Interview du Dr. Catherine Gueguen – Partie II

Vous insistez sur le fait que les parents et les professionnels doivent materner les bébés. Et cela fait écho bien sûr à nos démarches pour expliquer l’importance du toucher, mais aussi de la voix, du regard dans nos relations aux enfants. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus ? Et quel est le lien avec le fait d’apaiser ?

L’empathie c’est un travail sur les émotions

C’est toute l’attitude de l’adulte qui est fondamentale. C’est-à-dire que c’est d’abord aux adultes de comprendre ce que c’est l’empathie. Et je redis que l’empathie, c’est un travail sur les émotions. Si on n’est pas empathique vis-à-vis de soi-même, on ne va pas pouvoir être empathique avec les enfants. Plus on est empathique avec soi-même, plus on a de la compassion vis-à-vis de soi-même, plus cela nous protège aussi du burn-out. Vous devez savoir qu’en ce moment, il y a beaucoup de burn-out chez les parents et chez les professionnels de l’enfance et bien souvent c’est parce qu’ils sont durs avec eux-mêmes et pensent qu’il est possible d’être en permanence parfait, or c’est impossible, on fait tous des erreurs. Ils ont généralement peu d’empathie et de compassion pour eux. La compassion et l’empathie pour soi-même, c’est le premier facteur protecteur de burn-out. C’est un travail sur nos compétences émotionnelles, c’est-à-dire qu’il s’agit de comprendre nos émotions, nos besoins et savoir à quoi servent nos émotions. Elles sont fondamentales.

Ensuite il faut avoir de la compassion quand on fait des erreurs. Vous avez vu que j’ai commencé par le dire. J’ai commencé par dire que lorsque les adultes ont un mot qu’ils ne devraient pas avoir, un geste qui ne devraient pas avoir, il faut avoir de la compassion, en se disant : « Depuis des millénaires, on a toujours agi comme ça, donc il va falloir que je me défasse de tout ça ».

C’est un long chemin pour développer ses compétences sociales et émotionnelles. En ce moment, je ne sais pas si vous le savez, il y a tout un programme en France pour développer ces compétences psychosociales et socio émotionnelles. Et il faut que tous les adultes en relation avec les enfants aient des formations pour développer cette empathie. Sinon ils ne peuvent pas être empathiques avec les enfants, et comprendre les enfants. C’est d’abord aux adultes d’avoir ces formations. Et cette attitude bienveillante va être très importante, si elle est véridique. Si un adulte fait semblant d’être bienveillant, l’enfant le sent tout de suite. Donc pour que l’enfant se développe harmonieusement, il va y avoir le ton de la voix, il va y avoir le regard, il va y avoir le toucher – un toucher respectueux et chaleureux vis-à-vis de l’enfant.

La théorie de l’attachement

Le petit naît avec le besoin inné, vital, fondamental d’attachement qui est de créer un lien avec la personne qui prend soin de lui et qui pourra le réconforter, le protéger et lui donner une proximité affective en cas de détresse. Le rôle de l’adulte est de répondre à ce besoin de protection.

Vous avez parlé du fait que les adultes doivent avoir de l’empathie. Si cet enjeu est clair, cela peut pourtant être difficile pour des adultes de se libérer justement de l’éducation, consciente et inconsciente qu’ils ont reçue ?

Des formations pour développer l’empathie chez les adultes et le travail des émotions chez les enfants

On entend aujourd’hui des remises en cause de l’éducation positive, est-ce qu’il y a un vrai désaccord sur le fond, ou est-ce que c’est parce que cette notion a parfois été mal comprise ?

Pour beaucoup d’adultes, parler de leurs émotions, c’est un aveu de faiblesse